Médias : les clés de la numérisation d’un secteur

par ‘Jan 30, 2018’Média, Personnalisation

Internet a singulièrement chamboulé le paysage médiatique depuis les dix dernières années. Les médias traditionnels sont passés de l’incrédulité du début des années 2000 de voir s’imposer le numérique au constat d’évidence de ces dernières années : non seulement il faut faire avec, mais en plus, il est grand temps d’embrasser le numérique. Et effectivement, après avoir été d’abord dubitatifs, puis bousculés, avoir essayé de lutter puis s’être lancés, et sans être encore aujourd’hui certains d’avoir trouvé le modèle économique idéal, il est clair que tous ont en tête que la priorité est la numérisation de leur secteur.

Dans cette démarche, plusieurs facteurs sont à considérer, des facteurs qui ont mis du temps à s’imposer, que personne n’a complètement pris au sérieux à leur apparition, suffisamment peu pour ne pas être capables d’en anticiper leur importance.

Alors quelles sont les clés de la numérisation du secteur ?

 

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Get over it : les réseaux sociaux sont importants

Nous avons tous vu « The social network » où ce gamin futé d’Harvard pique les idées de ses potes pour mettre en ligne un trombinoscope universitaire et qui dix ans après compte 2 milliards d’utilisateurs mensuels et est l’un des hommes les plus influents de la planète. Et pourtant, cela a pris du temps pour la majorité d’entre nous (je ne parle pas des millenials qui sont nés avec, voire trouvent Facebook ringard) de réellement accuser réception de la révolution liée aux médias sociaux. Si Facebook atteignait déjà en 2009, seulement 5 ans après sa création, les 100 millions d’utilisateurs, sa croissance, depuis, a été exponentielle. Et à l’instar de la plus grande entreprise de transport qui ne possède aucun véhicule, de la plus grande compagnie de locations saisonnières qui ne possède aucune maison, FB est devenu le plus grand média qui ne produit pourtant aucun contenu. Comment alors les médias, qui eux produisent des contenus quotidiennement, peuvent tirer leur épingle du jeu quand de surcroit une grosse partie de leur trafic vient de ces réseaux sociaux eux-mêmes ?

Et bien, trêve de scepticisme : les plates-formes sociales sont bel et bien là, il est important que les médias d’une part sachent les utiliser pour augmenter leur trafic et leur visibilité (tout en gardant en tête que le trafic qui en émane n’est pas particulièrement qualifié) et d’autre part réussissent à maitriser leur dépendance face à ces grands acteurs du numérique afin de ne pas subir chaque lubie de leurs CEOs. Ainsi, le 12 janvier dernier FB annonçait désormais donner la priorité aux contenus partagés par les amis (probablement pas par philanthropie, mais parce que le ciblage publicitaire tire un meilleur parti de ce type de contenu) que des articles médias…

Une bonne manière d’éviter la dépendance est de diversifier ses canaux : essayer d’utiliser toutes les plates-formes sociales (en lien avec votre cible), mais également d’exploiter au mieux ses propres médias : son site, sa newsletter, son appli, ses alertes, etc. 

 

Make it happen : l’acculturation numérique du secteur

À l’heure de l’avènement de l’intelligence artificielle, pourquoi les algorithmes sont si discrets sur les médias numériques issus des médias traditionnels ? Une grande partie du problème est de faire accepter par les acteurs du secteur, et en partie les équipes éditoriales pour ne pas les nommer, que des algorithmes peuvent les aider à mettre en valeur les contenus, les filtrer, les trier, etc. Il faut bien évidemment aussi les rassurer sur le fait que ces algorithmes peuvent être paramétrés selon les envies afin de conserver des valeurs, une ligne éditoriale ou encore s’assurer qu’une victoire à la coupe du monde de foot soit correctement relayée.

Les algorithmes d’apprentissage savent aujourd’hui recopier, voire créer, des tableaux de Rembrandt sans que les experts mondiaux ne sachent distinguer le vrai du faux, il n’est peut-être pas si loin le temps où les articles de journaux pourront être générés automatiquement. Alors là, oui le job des équipes éditoriales sera radicalement différent. En attendant, il suffirait juste que les journalistes puissent constater les vertus des algorithmes, qu’ils  soient rassurés sur le fait que les algorithmes aujourd’hui leur permettent de se concentrer sur leur expertise : écrire des articles, qu’ensuite c’est automatiquement que le contenu sera affiché, envoyé, trié, etc.  en fonction de tellement de paramètres et à partir de tellement d’informations qu’il aurait été impossible de le faire manuellement.

En conclusion entrainer les producteurs de contenus, les journalistes, les reporters dans ce processus de digitalisation et les éduquer sur le numérique est de la plus haute importance dans un processus de digitalisation.

 

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Do it right : la personnalisation médiatique

La prochaine votation en Suisse (qui est un régime de démocratie directe et qui fait que n’importe qui peut proposer quelque chose, convaincre x personnes de signer la proposition et la soumettre à un vote ensuite) concerne l’abrogation de la redevance audiovisuelle, émanant de quelques citoyens qui ne veulent payer que ce qui les intéresse. Clairement cela voudrait dire la fin du service public audiovisuel en Suisse…  Pourquoi je vous raconte ça ? Parce que cela reflète clairement les changements des habitudes de consommation médiatique, l’utilisateur (et pas seulement le Suisse) veut pouvoir accéder à du contenu qui lui plait, quand il veut et en plus, ne payer que ce qu’il regarde (la croissance fulgurante de Molotov TV illustre bien ce phénomène en France).

Et bien il n’y a pas de fatalité, tous les médias et en particulier dans leur version numérique peuvent être personnalisés à chacun d’entre nous à divers degrés. Du reste, il est assez clair que ce vers quoi nous tendons : à chacun son web, sa télé, sa radio, son journal à l’instar de ce que fait Netflix aujourd’hui.  Il n’y a à ce jour, pas beaucoup de freins techniques à cette personnalisation. Il est évident aujourd’hui qu’une transformation digitale réussie intègre une personnalisation de l’expérience client à tous les niveaux possibles. Pour revenir à la votation suisse imminente, peut-être qu’une personnalisation du service audiovisuel permettrait de satisfaire ces concitoyens helvétiques agacés par le modèle « broadcast » disponible aujourd’hui.

 

Watch it : le phénomène des bulles d’informations

La personnalisation est à notre portée et à notre porte : nous y sommes presque. Elle est possible et pertinente dans toutes les franges du secteur : TV, radio, presse, etc., et sur tous les supports : applis mobiles, web, emails, etc.

Il faut cependant être vigilants sur certains points et en particulier sur les risques d’enfermement des utilisateurs dans des bulles d’intérêt. L’homme est ainsi fait qu’il a tendance à se rapprocher de ceux qui lui ressemblent : sa famille, ses amis, les gens qui habitent dans la même région ou font le même job. Pour revenir à FB, plus vous partagez les contenus postés par un ami, plus les posts suivants de votre ami auront un score élevé et une probabilité élevée de se retrouver bien placés dans le fil d’actualité. Il est clair, qu’avec un tel algorithme de classement : plus les gens se ressemblent et partagent de contenus, plus ils ont accès au contenu les uns des autres et en bref assez vite : tous ces amis se ressemblent et ne sont exposés qu’aux mêmes types d’information.

Vous m’avez suivi ? C’est ce qu’on appelle dans le jargon une bulle de filtrage.  Notez bien que FB le fait à dessein.

Encore une fois, il n’y a pas de fatalité. On peut pallier ces risques potentiels sans pour autant revenir au modèle « broadcast », c’est à dire la diffusion de la même information à tout le monde, comme le fait la télévision ou la radio. Il existe de nombreuses manières de paramétrer les algorithmes de personnalisation afin d’assurer aux utilisateurs une capacité à découvrir des contenus inattendus, ou encore de conserver une ligne éditoriale.

Ainsi, personnaliser c’est bien, personnaliser sans créer de bulles de filtrage c’est encore mieux. Si en plus on peut conserver valeurs et ligne éditoriale : on a la clé.

Je ne peux terminer sans mentionner la naissance cette semaine d’un petit nouveau, un hebdo, l’Ebdo, qui a fait le pari d’une édition papier uniquement et sans publicité. Il est toutefois intéressant de voire que la stratégie de communication du journal est très orientée social media. Voyons comment cet extra-terrestre relèvera ce défi et souhaitons lui bonne chance en tous cas !

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CEO et cofondatrice de Mediego, Anne-Marie a eu auparavant une carrière académique (ancienne directrice de recherche à INRIA) dans le domaine de l'informatique. Elle saura vous apporter des connaissances techniques et vous transmettre sa passion pour les algorithmes de recommandation.

Anne-Marie Kermarrec

CEO, Mediego

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