Presse en ligne et presse papier : la même planète ?

par ‘Fév 8, 2018’Média

Il va sans dire que le Web a révolutionné la presse et les médias de manière générale. Le modèle économique, les réseaux sociaux, le potentiel de personnalisation, la place de la publicité, le temps réel sont autant d’ingrédients qui ont plongé les médias dans une sorte d’incrédulité d’abord puis de questionnement et qui aujourd’hui les poussent tous à revoir leur copie.

Si la stratégie digitale est au cœur des préoccupations des médias en ligne aujourd’hui, en particulier des directions marketing, s’est-on suffisamment penché sur les différences entre un article destiné aux rotatives ou un article destiné au Web ? Si les deux types d’articles sont évidemment consommés de manière très différente, qu’en est-il de leur contenu ? Un bon journaliste papier est-il devenu naturellement un champion du Web ? À l’inverse le numérique n’aurait-il pas créé de nouvelles vocations ?  Doit-on écrire de la même manière, doit-on traiter l’information de manière similaire, la restituer identiquement ? Quels sont les facteurs qui pourraient faire changer le fond, la forme au-delà de la diffusion ?

Sans prétendre à l’exhaustivité ni à l’exactitude, je vous livre quelques réflexions sur le sujet cette semaine. Et soyez indulgent, si je sais écrire des articles scientifiques ou alimenter notre blog Mediego, je ne suis pas journaliste. 🙂

 

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Articles en ligne et articles papier, gare au style éditorial

Un lecteur en ligne est par définition versatile,  soumis à de multiples tentations à portée de souris (ou de l’index sur les mobiles) qui peuvent dévier son attention, voire la perdre à jamais, qu’il s’agisse de vidéos, de publicités, d’articles recommandés ou encore d’alertes en tout genre, pire encore de liens hypertextes embarqués dans l’article, la probabilité qu’a votre lecteur de revenir à votre article après avoir cliqué sur son réseau social préféré est inversement proportionnelle aux nombres de ses connexions sociales. Au contraire, les lecteurs d’articles papiers sont dans une posture très différente : ils ont acheté le magazine ou le journal, se sont investis dans leur lecture en temps et en espace, ils ne lisent pas debout dans le métro entre deux stations, ils l’ont déplié et sirotent un Perrier tranche en lisant…. Vous avez nettement moins de risque de les perdre en route.

Alors pour être surs de garder un maximum l’attention de vos lecteurs, allez droit au but, oubliez les circonvolutions des débuts d’articles papier même si c’est au détriment d’un style impeccable, d’une structure bien réfléchie ou d’une argumentation bien amenée, séduisez vos lecteurs  dès le début.

Les exemples sont pléthoriques qui relatent les mêmes faits de manière différente pour une version papier ou en ligne : si le style est plus léché pour le papier, il est souvent plus incisif pour la version en ligne.

 

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Articles en ligne et articles papier, gare à la longueur de l’article

Il est bien connu que le degré de patience des internautes est infiniment plus faible que celui d’un lecteur papier.  J’en veux pour preuve qu’en moyenne un utilisateur Netflix quitte la plate-forme s’il ne trouve pas son bonheur dans les 90 secondes. Il suffit de comparer cette minute trente au temps qu’on passe a choisir un film pour une soirée à l’Imax du coin. Et encore, ce temps passe à quelques secondes sur un site Web classique.

Le lecteur numérique est soumis à cette même pathologie, ils ont le nez sur leurs écrans toute la journée, mais ne passent que quelques minutes sur la même fenêtre et donc sur le même article. Ainsi une version en ligne doit être courte, en moyenne moins de 1000 mots pour être efficace. Tout ce qu’on trouve de plus long aujourd’hui relève plutôt de versions papier mises en ligne et ont une infime chance d’être lu en entier. Et détrompez-vous , ce n’est pas toujours plus facile de faire court, comme le disait Blaise Pascal « Je vous écris une longue lettre parce que je n’ai pas eu le temps d’en écrire une courte », citation trop souvent attribuée à Churchill d’ailleurs.

 

Citez et variez vos sources

À l’instar de ce que je me permets de faire aujourd’hui en donnant des leçons de journalisme, l’auteur d’un article en ligne n’est pas nécessairement un expert. Internet aura rendu les lecteurs indulgents. Si on attend d’un journaliste de média traditionnel qu’il ait fait Science Po pour être crédible, les lecteurs sont habitués à ce que l’information délivrée en ligne ne soit pas signée des parents, voire même ils trouvent cela rafraichissant, car le style peut être plus spontané, le regard plus extérieur et prendre un sujet sous un angle original. Du reste, on se sent souvent beaucoup plus libres de parler d’un sujet dont on n’est pas expert, cette sincérité octroie une certaine fraicheur au discours.

Mais attention, cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas montrer patte blanche. Au contraire si vous n’avez pas le pédigrée de journaliste requis, il faut citer vos sources et qu’elles soit fiables si vous voulez être crédible. Ainsi pour ma part, j’ai trouvé beaucoup de ces idées sur contently.net.

En outre, en ligne, profitez-en pour varier vos sources, elles peuvent être audio, vidéo dans toutes les langues, c’est une richesse à exploiter… C’est un risque aussi à la dispersion de votre lectorat !

 

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De la réactivité

L’une des différences fondamentales entre un article en ligne et un article papier est le potentiel de réaction auquel vous vous exposez en tant qu’auteur. Il relève de deux choses : d’une part l’aspect viral des articles numériques, en deux trois clics de quelques personnes, surtout si elles sont influentes sur le net (c’est-à-dire suivies par beaucoup de personnes), votre article peut se diffuser comme une trainée de poudre ; d’autre part, vous vous exposez aux réactions immédiates, bienveillantes ou non, des anonymes. Ainsi lorsqu’une erreur est commise dans un article en ligne, il sera difficile d’en faire un erratum efficace. Si vous faites le buzz, c’est chouette, si vous êtes pris sur le fait d’une inexactitude ou d’une exagération il peut en être fait de votre réputation.  Un adage bien connu est que les écrits restent, mais les écrits numériques encore plus. Soyez donc prudents et gérez cette dimension comme il se doit.

Attention la réactivité peut aussi être votre alliée. Les corrections, les mises à jour, les compléments sont à portée de votre clavier. Et puis vous avez souvent un droit de  réponse temps réel. Sachez en profiter. Enfin, si vous produisez des articles en ligne, vous avez beaucoup plus d’informations sur la visibilité de vos écrits, les réactions qu’ils ont suscité, ce qui a marché, ou moins, autant d’éléments qui vous permettront de vous ajuster la prochaine fois.

Pour conclure, les deux styles ont des vertus, on peut être excellent journaliste papier et avoir su parfaitement s’adapter au Web. Le numérique laisse aussi une place à des auteurs en herbe qui ne caressent pas l’espoir d’un article dans un média papier.  Si on croit que l’avenir ne sera que numérique, comme par déformation professionnelle j’ai tendance à le penser, il faudra trouver une place digne de ce nom aux articles de presse traditionnels au style éloquent, écrits par des spécialistes qui peuvent prendre la place dont ils ont besoin pour étayer leur démonstration, car l’article numérique se doit d’être direct, concis attrayant (mais pas racoleur), mais prudent pour enchanter son lectorat !

Média et personnalisation la combinaison gagnante

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CEO et cofondatrice de Mediego, Anne-Marie a eu auparavant une carrière académique (ancienne directrice de recherche à INRIA) dans le domaine de l'informatique. Elle saura vous apporter des connaissances techniques et vous transmettre sa passion pour les algorithmes de recommandation.

Anne-Marie Kermarrec

CEO, Mediego

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